" MATE " PINOCHET



Augusto Pinochet est libre. Au moment où j'écris, le ministre britannique de l'intérieur M. Jack Straw a décidé contre la décision de la cour de justice de son pays, de permettre à Augusto Pinochet de rejoindre son pays, libre pour raison de santé.

Mais au Chili, le pays de ce dictateur, la justice ne peut rien contre son ex tyran, car laissez moi vous rappeler que pour accepter de quitter le pouvoir, après le vote de son peuple d'en finir avec son règne, Pinochet s'est réservé une place de sénateur à vie, lui assurant l'impunité dans son pays. C'est pour ainsi dire, le dernier espoir de voir un des plus cruels dictateurs de notre temps, jugé pour toutes les atrocités perpétrées contre son peuple. L'Europe vient de perdre une formidable occasion de prouver que où que l'on soit, qui que l'on soit, le crime et la cruauté sont des délits, aux yeux du monde et qu'il n'existe pas de prétexte pour se soustraire à la justice Humaine comme nous l'avait affirmé, il y a un an, M. Jospin à propos des criminels en ex Yougoslavie.

Mais je suis trop naïf. Je veux croire à une justice égalitaire. Je veux croire en une justice indépendante du pouvoir politique. Je veux croire en une justice du peuple faite par le peuple pour le bien du peuple. Et au lieu de cela, je vois que l'argent qu'on possède ou la classe sociale dont on est issue, sont, dans bien des cas, de meilleurs atouts pour la justice, que le bon droit ou même la vérité ne pourront jamais être. Et d'ailleurs, pourquoi la justice serait meilleure ou plus juste que ce que nous faisons de notre société. N'est-ce pas l'argent et le rang dans la société qui confèrent aux yeux de la majorité somnolente et de la minorité complaisante, une respectabilité, une aura même, qui leur donne le droit à peine voilé de transgresser des lois que bien d'autres subissent. Non, une société où amasser est plus important que de partager ne peut être qu'injuste.

Le pire dans tout ça, c'est qu'il n'y a pas de choix : c'est prédateur ou proie. Et essayer de sortir de ce schéma, vous bannis irrésistiblement aux yeux de tous. Regardez les exclus et les sortis du rang que la société génère. Tous ces électrons libres qu'elle ne peut cacher totalement, qu'elle essaie en vain de briser, de faire passer pour des coupables alors que pour beaucoup, leur seul tort, est de ne pas vouloir vivre comme des moutons dans cette société qui nous étouffe. Mais nous fermons tous, les yeux sur cette injustice là. Par exemple connaissez-vous les " mates " comme on les appellent prés de Prades. Ce sont des jeunes qui vivent au pied du Canigou, dans des " casots ", loin de la société de consommation. Ces SDF de la nature vivent de leur récolte et de " récup ". Ils l'ont choisi ou la vie a choisi pour eux, mais ils vivent et n'écrasent personne pour cela. Ils vivent presque oubliés de tous. Oui presque, car dernièrement pour six d'entre eux, la justice les a rattrapés. Leur crime est de ne pas avoir supporter que la bouffe que jettent les supermarchés leur soit refusée. Ce supermarché, " l'intermarché de Prades ", avait aspergé d'eau de javel, les poubelles dans lesquelles se servaient ces jeunes habituellement. Le ton est monté, la police est intervenu, et enfin la justice a fait son " travail " en condamnant la rébellion. Elle n'a pas cherché à comprendre, à jouer le rôle de médiateur que la situation exigé. Elle a sévi, verdict 3 000 F d'amende par personne. Une décision à l'image de la justice: en point d'interrogation et qui témoigne de la cruelle réalité de notre société: le rang ou le mépris.

Ces gens avait été condamnés bien avant leur jugement, du fait de leur différence. Alors tant que dans le coeur des représentant du peuple et dans nos coeurs à nous tous, un " mate " ne comptera pas autant que n'importe lequel des représentants de la " world company ", la justice ne sera pas au service du peuple. Et même si aujourd'hui, c'est un dictateur qui souligne l'impuissance de notre société à combattre l'injustice, ce sont les " mates " qui souligne sa défaite .

GREG

-fevrier 2000-




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