Les chroniques perpignanaises

I

Impitoyable employabilité





Récemment, une personnalité de la Classe Politique perpignanaise, dont l'étiquette pouvait laisser supposer une sympathie pour la cause populaire, a tenu des propos bien alarmants sur la politique sociale du département.
Ce Monsieur a fait part des opinions les plus intimes de son groupement politique, vis-à-vis de la protection sociale, et des impératifs de l'économie de Marché. On atteindrait actuellement un nombre critique de victimes du système au delà duquel la prise en charge (financière et social) des individus ne bénéficiant d'aucune rémunération, serait impossible. En clair, le budget ne permet pas d'aider tout le monde. Il faudrait donc sélectionner, parmi les victimes, ceux qui méritent un tel honneur. Or, l'échelle qui établie ce niveau de mérite s'appuie sur un critère, l'employabilité. On aidera alors, ceux dont est avérée la volonté, et la possibilité (!?), de travailler. Les autres devront se contenter du statut de pauvre ; les uns, pouvant se targuer de celui de chercheur d'emploi. Suivons, pour voir, cette logique impitoyable. Proposons donc de couper les vivres aux plus réfractaires et aux impotents ! Dissuadons les fainéants et les déviants asociaux de narguer les bonnes gens qui vont travailler sans demander a être plus riche que leurs patrons !
Si même les hommes de gauche se font les chantres du néolibéralisme sauvage et de l'individualisme méthodologique, pour quel bulletin opter. Nous, qui naïvement croyons encore que la richesse produite par chacun ne peut pas s'évaluer d'un point de vue monétaire ; nous, qui croyons que l'Etat est là pour venir en aide à ceux que le Marché ne peut intégrer, du fait de leur spécificité, de leurs besoins, et n'ayons pas peur de le dire, de leurs exigences !
Que certains individus refusent de signer des contrats de travail dont le contenu n'est pas négocié, mais leur est imposé, est une chose qui semble bien normale. Que ces gens là demandent à la société le minimum vital, et fassent leur vie comme bon leur semble, ne devrait pas constituer, en soi, une faute répréhensible.
Ces hommes qui, de par leurs fonctions, ne voient chez l'individu que l'utilité économique et la productivité, ont oublié que la richesse peut naître d'autre chose, que des entreprises. Ils devraient écouter, et ils entendraient que tout le monde ne cesse de déplorer le manque de communication et l'absence de liens sociaux. Or dans l'optique qu'ils préconisent, cette communication et ces liens sociaux n'existeront plus. Si on ne laisse pas le soin à ceux qui génèrent musiques, paroles, convivialité, Art de la paresse, sens aigus du plaisir, subtilité de la raison sensible, de produire dans leur sens, et comme bon leur semble, il nous manquera beaucoup plus que ne peut produire notre système économique.

St Thomas juin 2001




retour à la page de présentation