Racisme, sexisme
et autre catégorisation
de la différence






Partons de la considération, évidente et désespérante, que les représentants du genre humain ont toujours eu tendance à se catégoriser et à s'exclure les uns les autres . Quelle que soit la société ou l'époque choisies, quelle que soit la morale majoritairement acceptée, il ne me semble pas exagéré de dire que la plupart des hommes s'accordent dans ce besoin quasiment instinctif de se juger mutuellement en se basant sur une grille d'analyse préfabriquée. Cette dernière étant censée garantir leur sécurité et prévenir le risque de la perte de leur identité.

Le fait est qu'il est complexe de se connaître et, de surcroît, de connaître un autre que soi.

Cette difficulté suffit-elle à expliquer que les hommes s'abandonnent à la facilité de se classifier ? Oui, mais pour autant elle ne permet ni de l'accepter ni de la légitimer. Reste à savoir pourquoi nous évertuons-nous à refuser la différence de l'autre...Tout d'abord parce qu'il est plus rassurant de placer cette différence dans un cadre global, ainsi, l'être ne se singularise plus par son humanité, insaisissable, mais par son appartenance à un groupe, dénombrable et visible.

Cependant notre réflexe premier en situation de communication, celui d'évaluer nos ressemblances et différences avec autrui, nous conduit immanquablement à transformer l'autre en une sorte de miroir réfléchissant notre propre image. Cette transformation rendant, de fait, l'approche et la connaissance de cette personne impossible ; la démarche de communication se trouvant niée dans l'acte de parole.

Est-il possible d'échapper à ce mécanisme qui semble se mettre en branle à l'instant où se produit l'échange verbal ?

La réponse espérée est affirmative tandis que la réponse régulièrement constatée est négative.

Le problème est qu'il n'y a pas de solution préétablie, pas de conduite spécifique à tenir, pas d'attitude commune, qui nous rendent l'accès à l'autre toujours possible...pas de mots précis, pas de formules magiques qui ouvrent cette porte.

C'est à chacun d'entre nous de se remettre le plus souvent possible en question, c'est à nous qu'il tient de s'interroger sur notre capacité et notre envie sincère de comprendre, d'accepter l'autre qui nous fait face...de renouveler à chaque instant cet effort, celui qui nous permettra peut-être un jour de vivre en paix et dans le respect : l'écoute.

Ce mouvement irrépressible de classification est, paradoxalement, une tentative pour accéder à l'autre ainsi qu'à soi-même. En effet, si l'on peut ranger cet autre, qui nous surprend et nous dérange, dans un cadre générique ; on peut, dans le même temps, se ranger soi dans un autre espace. Se dire que l'on n'appartient pas au même milieu social, à la même culture, à la même religion, à la même espèce, lorsqu'il s'agit de la différence sexuelle, c'est encore tenter de se définir soi, de se donner une appartenance à un groupe autre, de saisir son identité.

Par bonheur ce qui constitue cette identité ne peut être réduit à ces contingences extérieures.

Et même s'il nous apparaît logiquement impossible de réussir à se saisir, c'est à dire de délimiter notre capital d'acquis et d'innée, cela ne devrait pas nous empêcher de nous y essayer, et cela pour deux raisons fondamentales : la première est que l'homme n'est pas un être exclusivement gouverné par la logique et la seconde est que ce dernier se singularise des autres êtres vivants par sa capacité, entre autres, à tenter et à vibrer pour toute entreprise soumise à un échec certain.

Camille




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